J : Vous avez présenté votre parcours professionnel, disons de façon très académique. Nous aimerions en savoir plus. Quels sont les faits marquants de votre parcours ?

PhL : Tout d’abord je suis fils d’artisans-commerçants installés dans une petite commune du bassin minier. Bassin minier dont la population était principalement constituée de familles immigrées de Pologne. La mixité sociale et culturelle ont toujours été une évidence pour moi. Et puis, très jeune, j’ai baigné dans la culture du travail, de l’œuvre, de l’action. Mes parents bouchers-charcutiers traiteurs ont vécu la naissance de la grande distribution. J’ai rapidement compris la nécessité de s’adapter, de se démarquer.

J : Vous parlez de travail, œuvre, action, c’est-à-dire ?

PhL : C’est une notion que j’emprunte à Hannah Arendt, philosophe du 20 ème siècle. Le travail au sens métier, savoir-faire, service, ce qui permettait de nourrir la famille. L’œuvre, parce que ma mère (traiteur) était une artiste. Elle offrait à ses clients bien plus que des plats préparés. Bien plus qu’un plaisir gustatif. Au travers de ces œuvres, tous les sens étaient émerveillés. L’action, au-delà du métier, tournée vers l’extérieur. Mon père était très engagé dans l’apprentissage et la vie syndicale.

J : Vous semblez admiratif de vos parents, et en même temps vous n’avez pas repris le flambeau de l’entreprise…

PhL : Cela m’aurait plu, j’adorais faire les tournées, livrer les clients en vélo avec panier de boucher, et sacoche. Poussé par l’ambition de mes parents pour leur fils (une sempiternelle injonction de mon père : « le fils du boucher doit toujours être le meilleur »), j’ai poursuivi des études chez les Jésuites. Expérience, et tranche de vie délicieuses : le travail intellectuel, manuel, la culture, le sport, la vie en collectivité, l’autonomie, la solidarité, l’autogestion, la contestation, l’esprit critique, la compétition, le plaisir… plein de bons ingrédients. Puis des études supérieures, puis des rencontres qui ont contribué à mes choix professionnels.

J : Quel est le chemin qui vous conduit à aujourd’hui ?

PhL : Un parcours fait de très belles rencontres. J’ai toujours eu la chance de rencontrer de belles personnes au bon moment, tant sur le plan professionnel que personnel. Je ne peux qu’associer et remercier ce « Petit-Cousin » de 80 ans aujourd’hui, qui m’accompagne depuis toujours. Ancien prof de français, latin, grec, histoire-géo : il m’a transmis « ses humanités » sa passion de l’enseignement, la confiance en l’autre, le sens de l’exigence et de la reconnaissance.

J’y associe BLB, collaboratrice de première heure, avec laquelle nous avons œuvré pour la formation, la culture client.

Nathalie, eh oui « mon guide » comme dans la chanson, qui m’a piqué au « Management »

Je ne peux oublier un certain GDZ, initiales désignant un DG brillant et totalement insoupçonnable, imprévisible. Deux leçons avec lui : « tu n’as jamais 2 fois l’occasion de faire une première bonne impression », « Si tu viens ici qu’avec des problèmes, pose-toi la question de savoir si le problème ce n’est pas toi » Juste pour situer le personnage. Ambiance.

Les femmes détenues d’une prison pour lesquelles j’étais chargé d’animer un module de préparation à la réinsertion intitulé « l’ouverture au monde extérieur ». Non, non ce n’est pas une plaisanterie. Ces femmes m’ont obligé à quitter définitivement « le savoir » pour « l’être ».

Un parcours fait de rencontres avec les autres et avec moi-même…

J : Avec vous-même ?…

PhL : Oui…c’était lors de la formation en PNL. Au cours d’une séance de travail sur soi et consacrée à

la métaphore, ma référente me raconta une histoire.

L’histoire d’une petite fille très malheureuse, qui pleurait assise sur le bord de la route. Un garçon sérieux, grave, néanmoins attentif, sensible et généreux la croise, s’arrête et veut l’aider. Debout devant elle, avec un regard perçant, et d’une voix assurée il s’adresse à cette petite en ces termes :

« Que t’arrive-t-il ? » lui demanda-t-il. « Pourquoi pleures-tu ? » Silence« Est-ce que tu veux parler de tes problèmes? » « Je peux peut-être t’aider » renchérit-il, inquiet de ses sanglots et de son silence.
« Mais il faut que tu parles ». Face à son impuissance, il lâche : « qu’est-ce que tu veux ? ». Et la petite de répondre : « juste un sourire… »

Cette histoire c’est celle du « magicien au regard laser », c’est toi. Conclut ma référente avec un large sourire empreint de bienveillance.

Ce jour-là, c’était en 2000, je ne savais pas concrètement ce que je ferai, ce fût comme une révélation, et j’ai écrit ce qui suit. Cela fait 15 ans, et finalement c’est ce que je vis.

J : Et donc nous voici arrivés à aujourd’hui ?

PhL : Oui, c’est une rupture avec le monde du salariat. Je me consacre à cette nouvelle mission, en

profession libérale. Néanmoins, il y aura encore deux événements majeurs.

Le premier c’est la rencontre avec la mosaïque et le travail de la terre. Un choc…une nouvelle révélation. J’ai eu la chance à 50 ans de préparer un CAP de céramiste et d’exercer dans un atelier sur un circuit des métiers d’art. Au travers de la mosaïque j’ai compris que le travail de la matière, et

Entre mer et montagne,

Je suis architecte et jardinier de la vie en 5 dimensions, exigeant, reconnaissant, généreux, vivant en harmonie avec l’environnement, les autres et moi-même.

Je contribue par ma disponibilité, mon écoute et le partage à développer pour chacun la possibilité de trouver et se réaliser sur son chemin.

Je développe par mes actions, le

respect, la tolérance, la foi en l’homme,

la passion de l’autre et l’harmonie

collective.

Mon projet

la relation à l’autre était de la même nature. On ne lutte pas avec la matière, on ne gagne jamais, même quand tous les sens sont centrés sur le travail, au mieux on compose. C’est exactement la même chose dans l’efficacité relationnelle.

J : Et le second alors…un autre voyage initiatique ?

PhL : Oui, Une passion commune avec ma compagne : la découverte des cultures par le voyage en immersion. Et donc la découverte de la culture africaine en particulier la rencontre avec le peuple Dogon et la culture Cap Verdienne. Ces peuples et leur culture sont non seulement sources d’énergie, et surtout sources d’inspiration. Ils constituent une référence dans mes recherches sur le management, l’organisation collective, la cohésion sociale, le sens du travail, les relatons intergénérationnelles….et bien d’autres sujets. Sujets qui sont d’actualité chez nous, et pour lesquels leur mode vie doit nous amener à réfléchir.

J : En fait depuis longtemps votre voie était tracée…vos valeurs, votre « Petit-Cousin »….

PhL : Pas si simple, d’accepter d’aller vers soi. Mais quel bonheur !!! Je vous rappelle que les valeurs même si elles constituent le socle de soi, ne sont que l’expression de l’idéal de soi vers lequel on tend. Le chemin est jalonné d’obstacles, d’égarements. L’amour du conjoint dans ces moments- là est plus que précieux.

J : En 3 mots comment vous définiriez-vous aujourd’hui ?

PhL : « la petite voix » avec une approche pluridisciplinaire, me convient, disons agitateur d’idées prônant l’autonomie de réflexion et de décision.